Alors là, je sens que je vais me prendre une volée de bois vert par certains @mis. Non pas parce que l'album que je mets en album de l'année fait parti de la sélection des inrocks (le seul que j'ai en commun avec ce canard par ailleurs) mais parce qu'en ces contrées hostiles je crois être le seul à l'adorer, à lui vouer un culte qui ne se dément pas au fil des écoutes.
Commençons par définir un peu ce qui fait qu'un album va rentrer dans mon top.
Est-ce parce qu'il m'impressionne d'entrée de jeu, que je me prends une baffe comme je me suis rarement prise (Deathspell Omega, Cheveu), parce que c'est un album qui m'a pris par surprise, doucement, qui s'est installé chez moi sans que je lui demande quoi que ce soit (Darkstar) ? Qu'il confirme tout le bien que je pensais d'un artiste en enfonçant la concurrence six pieds sous terre (Sharron Kraus) ? Ou alors la découverte d'un disque qu'à priori rien ne prédestinait à finir dans un top ? (celui dont je vais parler dans très peu de lignes, voir maintenant.)
Alors qu'est ce qui fait qu'un album rentrera dans mon top ? Tout ce qui a été énoncé ci-dessus mon capitaine
Qu'est ce qui fait qu'un disque de rap, putassier sa race, véhiculant clichés sur clichés finit tout de même par être album de l'année chez moi ?
Il est vrai que la première écoute du Sir Lucious Left Foot: The Son of Chico Dusty de Big Boi ne donne pratiquement pas d'indice quant à sa finalité sur une marche aussi haute. Tout au plus se détache le duo tangerine/you ain't no DJ, impressionnants de noirceur pour l'un et mettant l'expérimentation à portée de tous pour l'autre. Follow us donne envie de s'enfuir plus que de suivre Big Boi, hustle blood sent le R'n'B pourri comme on peut en entendre au kilomètre sur NRJ ou skyrock. Tout ici sent le factice, la caricature : Des samples jusqu'à l'utilisation des instruments par ordinateur. Rien n'incite à suivre Big Boi dans son délire mégalomaniaque (general patton). Rien sauf un putain de talent à composer des morceaux qui rentrent dans le crâne sans pouvoir s'en déloger. Putassiers mais tellement bien foutus qu'il pourrait nous faire avaler des couleuvres sans qu'on n'y trouve à redire. Rien sauf à composer un album qui soit un tout, une entité qui embrasse tous les styles présents dans le rap actuel sans pour autant verser dans la facilité.Rien sauf un talent à passer du r'n'b à la pop, du rock au jazz,du rap à la drum'n'bass, des années 80 à la dernière décennie (shutterbug), à brasser tous les styles dans un délire aux couleurs chamarrées, complétement barré. Sir Lucious Left Foot: The Son of Chico Dusty c'est ça et plus encore.C'est treize tubes sur quinze titres et presque autant de sommets. Un monstre assumant son statut, tutoyant le ridicule sans jamais y tomber, osant dans le même morceau mélanger pop, rap, jazz, choeurs doo wap (turns me on), donner ses lettres de noblesse au R'n'B (hustle blood, be still), remettre au goût du jour les sonorités 80's, voix trafiquées au vocoder et choeurs délirant (shutterbug, tube imparable), utiliser un sample d'opéra comme base d'un morceau martial (general patton) ou se lancer dans l'expérimentation barrée (you ain't no dj) sans pour autant être inaccessible.
Big Boi ose tout, invite une personne différente sur chaque morceau mais au lieu d'avoir un album de guests de luxe s'éparpillant (comme le dernier Kanye West, pas mauvais mais inintéressant) il parvient à rendre son album cohérent et réussi sur quasiment toute la ligne ( follow us et son refrain pourri, raté, et dans une moindre mesure shine blockas).Quelque soit le genre abordé, chaque tentative est une putain de réussite (for yo sorrow : électro, pop, drum'n'bass, rap ; night night : electro/pop trompettes mariachis, choeurs féminins jazzeux : leur point commun ? malgré la diversité des genres évoqués, ces deux titres sont de véritables tubes d'une intelligence redoutable.) Big Boi utilise toutes les recettes qu'il connaît (faire parti d'Outkast a beaucoup aidé je pense) et vise juste à chaque fois. Comme Outkast le rap sert ici de base pour partir explorer d'autres territoires. Et comme la plupart des albums d'Outkast , c'est une putain de réussite. Big Boi en cette année 2010 se positionne comme le Prince de cette décennie (Rôle que je pensais par ailleurs dévolu à son comparse André 3000 dont le second disque du speakerboxxx/the love below ramène aux grandes heures de sign "o" the times.). Un Prince qui aurait troqué ses instruments pour un sample et un ordinateur. Tout aussi salace soit dit en passant.
Dire que j'ai écouté cet album un nombre de fois incalculable (jusqu'à deux ou trois fois par jour l'été dernier) est un doux euphémisme. Sir Lucious Left Foot : The Son of Chico Dusty est l'album qui, cette année, m'a le plus rendu accro. J'ai essayé d'écouter mes @mis me disant que c'était n'importe quoi, une musique pourrie, caricaturale, accumulant tous les clichés (fringues, bijoux, attitude, grande gueule, etc..), bref, voulant me ramener à la raison, rien n'y fait. A chaque fois que je plonge dedans je ne peux m'empêcher de l'écouter deux ou trois fois de suite. Ce Big Boi est un plaisir coupable que j'assume à 300 %. La preuve ? en écrivant cette note, j'en suis à la troisième écoute. Que voulez-vous, on ne se refait pas.
Album de l'année ??? trois fois oui. N'en déplaise aux grincheux qui me servent d'@mis. Sur ce je vous laisse, j'y retourne. J'ai essayé la désintox mais là c'est plus fort que moi. Cette année Big Boi m'a tuer.
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