Le concert de l'année. Ni plus, ni moins.
Normal, c'est le seul que je suis allé voir cette année.
Que je vous explique tout de même : je suis allé dimanche, à Laval en Mayenne, voir Spain au 6par4. Non, ce n'est pas la capacité d'accueil des spectateurs de la salle mais bien les mesures de la scène accueillant les groupes.Bande de mécréants va.
Mais je m'égare.
Or donc : Spain.
J'arrive, accompagné de femmes, enfants, veaux, vaches, cochons, enfin en famille quoi, dans ce qui ressemble à l'antichambre d'une EPHAD tant la moyenne d'âge des spectateurs fait peur à voir. Avant que Josh Haden et sa bande n'envahissent la scène, je regarde autour de moi, voir si je suis le seul pré-quadra de la salle, puis me fais peur en me demandant si je ne me serais pas télétransporté à une séance d'enregistrement de questions pour un champion voir des chiffres et des lettres. Limite que je renfilais ma blouse d'infirmier pour la distribution des médocs. Mais hé, pas cons les gars du 6par4 : programmer un concert le seul jour où n'est pas diffusé questions pour un champion, et ce dans le même créneau horaire (entre 18 et 19 heures), relève du génie marketing pur et simple. Chapeau bas les gars.
Qu'à cela ne tienne, le concert commence. Josh arrive, cool, loin de l'image classe du blue moods, avec chemisette, jean, lunettes, gueule mal rasée et coiffure débraillée.Le gars empoigne sa basse, jette un oeil sur sa gauche à son guitariste, sur sa droite à son claviériste puis se retourne et attend le signal de son batteur. Le concert commence par un titre du dernier album. Le son est clair, massif pourtant il semble bien fatigué le Josh, le regard perdu dans ses chaussures ou les yeux clos, c'est au choix, chantant néanmoins divinement. Pour le moment il fait son job, de façon pro mais impersonnelle. Fin du premier morceau, applaudissement polis de la salle. Idem pour le second. Arrive ensuite ray of light et là le concert commence à décoller. Josh prend de l'assurance, se détend et c'est parti pour près d'une heure et demie de concert. Piochant dans tous les albums de Spain, le répertoire se répartit entre quelques morceaux pop de i believe (un ou deux, pas plus), she haunts my dreams pas mal de the soul of spain (normal me direz-vous c'est celui dont ils assurent la promo) et la quasi totalité du blue moods (ne manquera à l'appel que it's so true). La répartition se fait de façon homogène entre morceaux introspectifs et pop mélancolique (magnifique it all went wrong, frissons à la pelle, je vous le garantis). Plus Josh et sa bande déroulent leurs titres, plus il se détendent et meilleure devient la réception du public, la qualité du concert allant crescendo donc. Néanmoins, celui-ci aurait pu être fabuleux si Josh n'avait pas confié la lead guitare à Jean-Michel Apeuprès. Parce que le gars à sa gauche.....comment dire....n'avait ni le toucher, ni la fluidité de Ken Boudakian, guitariste du premier album. Le pauvre hère s'en sortait très bien sur les morceaux rapides, pop, des derniers albums mais alors quand il s'agissait de jouer ceux du blue moods et notamment les soli, c'en devenait catastrophique : fausses notes à répétition, gammes descendues à l'aveugle et soli approximatifs écourtés de façon éhontée. Mes oreilles ont failli saigner plus qu'à leur tour. Heureusement pour lui les autres musiciens assuraient le sauvetage en vol et rattrapaient ses erreurs notamment le claviériste/guitariste rythmique qui parvenait à se recaler à chaque fin de solo sans que cela ne gêne vraiment de trop pour qui ne s'est pas enfilé quelque centaine de fois le blue moods.
A part ce bémol, récurrent certes, de véritables moments de magie. Le premier rappel, spiritual, d'une limpidité, d'une beauté confondantes. Le morceau à te faire prendre la soutane illico et passer le restant de tes jours à communiquer avec dieu via Josh Haden. Si le morceau passe un peu inaperçu en fin d'album, en concert il prend une toute autre dimension : spiritual s'adresse curieusement d'abord à l'âme, puis au cerveau et enfin descend aux tripes via l'échine. Le son vous enveloppe, l'orgue vous happe, vous êtes présent dans la salle mais en état de lévitation permanente. Les larmes finissent même par vous prendre par surprise. L'enchaînement avec untitled #1 permet de redescendre quelque peu mais à peine. La salle, qui attendait ce morceau depuis le début, est à l'unisson du groupe qui semble prendre véritablement plaisir à jouer. Pour preuve, Haden ouvre les yeux sur la salle et voit que nous ne sommes qu'une poignée de spectateurs (une centaine tout au plus) transis d'amour pour sa musique.
En regardant la set-list du concert, une fois le groupe barré de la scène, je vois que celui-ci (le concert; pas le groupe) devait s'achever avec world of blue. La réception du public fut telle sur ce morceau que le groupe n'a pu s'empêcher de revenir jouer deux rappels. Avec cet aparté, j'en viens donc au moment fabuleux du concert : world of blue. Comment dire : si la musique de Spain sait se faire douce, pop, parfois nerveuse, pas grand chose ne pouvait laisser transparaître les quinze minutes apocalyptiques de ce morceau. Celui-ci commence comme sur le disque : basse omniprésente, lente, très lente, très très lente, une note toutes les trois ou quatre secondes, batterie feutrée dans un premier temps. Lentement mais sûrement le morceau monte, la tension devient de plus en plus palpable et là où sur disque le morceau devient quasi évanescent, en concert le chaos finit par l'emporter. Il est vrai que tout au long du morceau et au vu de ce que le groupe était capable de produire sur scène, vient se poser la question des limites qu'il pouvait se donner en matière de chaos. Réponse cinglante : aucune. Le batteur cogne sur ses fûts sans trop se soucier de ses partenaires, Haden et sa basse jouent au métronome et semblent ne plus faire qu'un et enfin les guitaristes ne répondent plus de rien. Au fur et à mesure qu'avancent les minutes, le morceau ne leur appartient plus ou plutôt revient de droit à un autre groupe capable de jouer à deux à l'heure sous tension extrême : Low. World of blue en concert c'est la mue d'un groupe sage, propre sur lui, en un groupe toujours propre sur lui mais nettement plus inquiétant car capable de véritables coups de sang, voir de massacres sous ses airs gentillets .Un truc à vous faire exploser les sonotones et sauter les râteliers des rares personnes âgées encore vivantes au bout d'un quart d'heure de chaos. Un véritable bonheur avec décrochement de mâchoire, bras ballants et frissons vous secouant la paillasse. Une apothéose.
Après réflexion et évacuation des corps du 6par4, il apparaît tout à fait logique que le morceau suivant world of blue soit spiritual. Mise à mort plus messe dans un même concert, Spain a pensé à tout.
Le seul pré-quadra de la salle? Coooooooooooooooonnnnnnard! On en reparlera dans quelques semaines, mon presque vieux!!!
RépondreSupprimer