mardi 25 septembre 2012

777 cosmosophy


"le meilleur album de l'année voir des siècles à venir" NMI.
"Une fenêtre ouverte sur le monde, comme un éclairage de nos tares les plus viles, les bassesses les plus inexpugnables" J-D Buffallo, Les Indéféquables.
"hein ?" Beethoven, musicien monomaniaque malentendant.
"la première fois j'ai eu peur d'avoir mal mais après ça a été mieux" Cindy rédactrice en chef d'étrons et laiderons
"Arrêtez avec vos tops, ça c'est le PUTAIN D'ALBUM DE L’ANNÉE." D.Y, dictateur chez Vilosophe.

Voici les quelques réactions/témoignages que j'ai pu obtenir sur le dernier volet de la trilogie 777 de Blut Aus Nord. Je me suis évidemment limité à cinq réactions parmi les millions recueillies un peu partout sur le net ou les magazines en kiosque ce jour.
Tout ça pour dire ceci : la sortie ce jour de cosmosophy fait figure d'événement mondial, occultant par là même le scandale des caricatures ou encore la sortie hexagonale du dernier Tryo.
Que voulez-vous, c'est tout à fait compréhensible. Depuis la sortie de sect(s) l'an dernier, le culte voué à Blut Aus Nord a tendance à dépasser la sphère des adorateurs du black métal pour entrer dans l'inconscient collectif de la ménagère qui n'en demandait pas tant. Tel un virus, l'infection se propage, faisant à chaque nouvelle écoute un nombre de victimes substantiel. Sect(s) en premier lieu puis the desantcification, l'esprit si particulier de BaN s'est peu à peu ouvert au monde sans pour autant se compromettre. Pas un mince exploit me direz-vous.
Faisons fi de cette brillante introduction et passons aux choses sérieuses. Je vois poindre dans vos yeux esbaudis l'inéluctable question : qu'en est-il de cosmosophy ? Chef-d'oeuvre ou album de la décennie ? Tuerie ou merveille ??
Comme je suis un être affable, une crème dans son style, je vous répondrai presque par l'affirmative aux quatre questions posées.
Presque hein, n'exagérons rien.
En premier lieu il convient de faire remarquer qu'à la première écoute, cosmosophy déstabilise. Vous me direz fort justement que c'est un peu le principe qui régit toute la discographie de Blut Aus Nord. Certes. Mais quand même. Déjà, commencer un album par un morceau de clôture, ça le fait moyen. Ensuite commencer un album par la relecture d'un morceau précédent, genre copier/coller, ça le fait encore moins moyen. Et enfin, enfin, quand au bout de deux minutes et demi d'intro arrive la voix, claire, là je dois avouer que ça ne l'a pas fait. Mais alors pas du tout. Franchement, après une dizaine d'albums (douze pour être exact) dans lesquels la voix n'était qu'une longue éructation gutturale inintelligible, se retrouver face à une voix "normale", je dois avouer avoir eu un des plus gros chocs de mon existence satanique. Je me suis retrouvé face à une interrogation quasi existentielle : dois-je continuer l'écoute de cosmosophy ? Imaginez-vous tout de même la crucialité de  l'interrogation  : DOIS-JE CONTINUER L'ECOUTE DE COSMOSOPHY ??? Le genre d'interrogation qui ne m'a jamais, au grand jamais, traversé le peu d'esprit qu'il me reste quand je pose sur la platine un disque de Blut Aus Nord. Une véritable révolution.
La question m'a, par ailleurs, re-traversé l'esprit lors de l'introduction de l'epitome XV dans lequel Vindsval déclame, sur un ton solennel, péremptoire même, sur fond d' indus rachitique, un texte à forte obédience sataniste. Pitié.
Deux fois lors de la première écoute  ?? mais alors... c'est de la merde !!!!
Ah mais non, ne me faites pas dire ce que vous désirez entendre. Je n'ai pas parlé d'étron au début de cette note mais de tuerie, j'ai également ajouté que la première écoute déstabilisait.Ajouté à cela une tendance au progressif et à l'ambient (déjà présents sur les deux premiers volets) et vous comprendrez aisément que le fan de base comme moi puisse y perdre son latin sataniste.
Les réserves faites, passons à autre chose. Une fois la première écoute passée, cosmosophy se révèle être passionnant. D'un point de vue musical il s'agit là de l'album le plus riche du groupe, du moins le plus varié. Dès l'epitome d'introduction (le XIVème) Vindsval reprend et termine les thèmes des précédents volets  pour ouvrir sa musique sur de nouveaux territoires qu'il n'avait fait qu'effleurer jusque là. Pourtant, à l'écoute de cosmosophy, ces nouveaux territoires sont loin de nous être inconnus.On reconnaît aisément quelques bribes de MoRt (la fin de l'epitome XV), énormément d'éléments des memoria vetusta  (l'epitome XVI), d'ultima thulée (les synthés du dernier epitome). En fait cosmosophy, vous l'aurez compris, est une synthèse presque idéale de la discographie de Blut Aus Nord. Il constitue une épitaphe quasi-parfaite de ce que fut BaN pendant près de vingt ans et confirme les changements entr'aperçus dans the desanctification : là un net penchant pour l'ambient, ici pour le progressif ou encore l'industriel. Mais à vrai dire ce n'est pas tant l'ouverture vers de nouveaux horizons qui interpelle dans cosmosophy, c'est plutôt le fait que le métal de BaN devienne de plus en plus "lisible", qu'il soit le parfait négatif de MoRt. On reconnaît la même démarche dans les deux cas, un jusqu'au-boutisme intransigeant, mais là où MoRt fonçait tête baissée dans le noir, le charbonneux jusqu'à y perdre la raison, cosmosophy fait entrer la lumière d'une façon inédite chez ce groupe. Elle éclaire d'une façon blafarde un univers jusque là d'une noirceur absolue, découvrant par la même occasion des richesses mélodiques insoupçonnées. Bien évidemment nous ne sommes pas chez les La's, l'univers reste celui de Blut Aus Nord, torturé, identifiable dès les premières secondes mais pour le coup le groupe finit par devenir quasi-audible à l'oreille du profane.
En fait comme l'explique Vindsval, cosmsophy marque la fin de Blut Aus Nord tel qu'on a pu le connaître vingt ans durant. Les éléments black metal qui parsemaient sect(s) et de façon de plus en plus sporadique the desanctification sont ici gommés au profit d'une entité progressive incluant un spectre musical bien plus large allant grosso modo de l'ambient à l'indus voir les deux sur le même morceau (epitome XVII) en passant par une sorte de rock mélodique teinté d'une certaine mélancolie (le début de l'epitome XVII). On retrouve parfois des montées de sève fort bienvenues (les deux dernières minutes de l'epitome XVI, impressionnantes) mais l'ensemble ne ressemble plus à l'idée qu'on peut se faire du black metal (déjà mise à mal lors des précédents opus du groupe). Seulement à du Blut Aus Nord. La mue opérée lors des deux derniers opus (à savoir un black metal froid, sombre -sect(s)- puis plus aéré, moins torturé) trouve son point d'orgue ici : après avoir été l'un des tortionnaires les plus innovants/radicaux du black metal (MoRt ou the work which transform...), Vindsval se révèle être un des sound/songdesigner les plus passionnants avec ce cosmosophy bien plus subtil qu'il n'y paraît au premier abord. La dissonance reste toujours sa marque de fabrique mais ce n'est plus l'atmosphère qui prime ici, ce sont  les mélodies. Elles s'ancrent dans le crâne, fourmillant de détails, chaque nouvelle écoute en révèle de nouveaux  passés inaperçus lors des précédentes et surtout, surtout, cosmosophy devient plus addictif et passionnant à chaque écoute. Une fois appréhendés, assimilés, les "défauts" présents lors de la première écoute s'effacent pour laisser place à une entité d'une grande cohérence, un tout indissociable répondant de façon brillante aux questions que Vindsval se pose tout au long de sa trilogie : comment changer sans perdre son identité et surtout,  que reste-t-il après le chaos ?
Cosmosophy y répond de façon limpide, simple et totalement inédite chez Blut Aus Nord  : en apprivoisant la lumière, en laissant entrer l'espoir.
Une véritable révolution.

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